mardi 8 mai 2012

Dire et connaître




J'aime souvent à dire qu'on ne parle bien que de ce qu'on connaît. Ce qui, inéluctablement, me conduit à ne pas parler beaucoup, à longuement hésiter avant d'écrire, et à beaucoup me restreindre dans mes choix de sujets. Je parle donc de moi et de mes opinions, et j'ai beaucoup de difficultés à parler des autres et du monde : qui suis-je pour y connaître quoi que ce soit ? Comment être sûre de ne pas dire de bêtises ? Parfois je prends des risques, souvent je m'en veux a posteriori. Je débats peu, je ne connais pas les chiffres par cœur et l'aplomb des autres m'intimide : eux, ils ont l'air de savoir de quoi ils parlent. Parfois j'ai des doutes quant à la qualité de leurs sources et de leur raisonnement, mais je me trouve bien démunie pour leur répondre suivant ma propre éthique personnelle. La scientifique que je suis est incapable de dire quoi que ce soit sans analyser diverses sources fiables au préalable, et ce n'est pas vraiment adapté à la conversation à brûle-pourpoint. Au fond que sais-je ? Que crois-je savoir ?

Au final, ces réticences sont bien handicapantes face à un sujet de composition. Le bachotage aide. Pouvoir réciter des faits appris dans des livres, soit. Ça fait toujours des choses à rajouter dans la copie. Le jeu étant de réussir à réutiliser un maximum des quelques bribes de savoir accumulées, quelque soit le sujet posé. De quoi aurais-je pu parler sans trop de risques à propos de « la géographie, ça sert d'abord pour faire la guerre », quels faits aurais-je pu citer avec suffisamment de certitude pour les coucher sur ma copie ? Des grands explorateurs, de la colonisation, des cartes géologiques, des ressources en eau, du pétrole, de l'aménagement du territoire ? Soit. Mais une fois entrée dans le vif du sujet, j'ai toujours du mal à me départir d'un sentiment d'usurpation, de n'avoir rien à faire là. Je ne connais des explorateurs que quelques noms, de la colonisation que trois dates, des ressources en eaux que des schémas géologiques. Tout ça me paraît vain. Tenter de parler de choses qu'on connaît à peine comme si on en connaissait les tenants et les aboutissants... Je ne veux pas faire de la politique, juste être bibliothécaire !

Alors nous nous astreignons à cette tâche, pleins d'espoirs que, la prochaine fois, ce sera plus facile, ça passera mieux, on aura plus à dire... À l'usure, ça finira bien par passer, non ?

Licence Creative CommonsPhoto : prise par moi-même à Bercy le 29 avril 2012.
Ce texte et cette photo sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage à l'Identique 2.0 Générique.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire